La Classe des pasteurs d'Erguël (dite aussi Vénérable Classe ou Compagnie) est créée en octobre 1530, peu après l'introduction de la Réforme dans cette région et l'octroi à Bienne des droits civils et ecclésiastiques de l'Erguël. Elle regroupe les ministres du Vallon de St-Imier, d'Orvin, de Perles et de Bienne. En 1562, cette organisation est plus précisément définie, notamment par le renforcement de ses compétences en matière de censure pastorale. L'assemblée des « ministres du Saint Evangile » est prévue annuellement, sous la direction du doyen, réélu chaque année (il avait un rôle important puisqu'il représentait l'Eglise auprès des autorités civiles). Elle représente l'autorité suprême en matière de droit ecclésiastique. La Classe d'Erguël ne subit ensuite plus aucune transformation jusqu'en 1610, date à laquelle, suite aux accords de Baden, l'Eglise de Bienne est séparée des autres paroisses de l'Erguël. La Classe comprend alors sept ministres (huit dès 1679) et un diacre, et étend son autorité sur les paroisses du Haut et du Bas-Vallon de St-Imier, de Tramelan, Orvin, Vauffelin et Perles. Ces dernières sont cependant aussi soumises à l'autorité de leur seigneur temporel catholique, le prince-évêque de Bâle. C'est par exemple à lui que revient le droit de nommer les ministres, et c'est donc à lui que le nouvel élu doit prêter serment. Par contre, tout de qui concerne les affaires internes à l'église, tout ce qui touche au dogme, au culte ou à la discipline, est du ressort de la Classe.
Durant le 17e siècle, les relations avec la cour épiscopale restent assez stables, malgré une série de troubles confessionnels dont le point culminant est atteint avec la question de la minorité catholique de la Prévôté de Moutier-Grandval. Le traité d'Aarburg (1711) met fin à ces conflits confessionnels.
Le début du 18e siècle est marquée par un certain nombre de transformations au sein de la Classe, dues notamment à son doyen, le pasteur Breitner, et qui s'inscrivent dans une vague de renouveau soufflant sur toutes les églises réformées de Suisse occidentale. La Classe adopte, en 1725, le psautier de Bénédict Pictet (texte adapté), une nouvelle liturgie inspirée de celle d'Ostervald (1726) et le catéchisme de Heidelberg (d'après P.-O. Léchot, ceci est plutôt à voir comme une marque de soumission face à l'influence de Berne sur la Classe). D'autres changements se font dans les modes de fonctionnement du corps pastoral. Breitner est aussi le rédacteur du Règlement concernant le ministère en Erguël adopté à la conférence de Büren en 1731. Véritable constitution ecclésiastique, ce règlement instaure notamment les visites d'Eglise dont le but est de juger de la vie des paroisses et de la manière dont les pasteurs s'acquittent de leur devoir.
Malgré cette atmosphère de renouveau, la Classe se montre aussi parfois particulièrement intransigeante, comme par exemple dans le cas du mariage du pasteur Faigaux avec sa cousine. Il est vrai néanmoins qu'il faut aussi y voir une volonté de la Classe de céder le moins possible à l'absolutisme du prince-évêque (qui, lui, acceptait le mariage en question).
Pendant la Révolution, la Classe continue de se réunir. Mais le rattachement du Sud de l'évêché au département du Mont-Terrible (1797) puis du Haut-Rhin marque l'arrêt de cette organisation.
Par la suite, l'Eglise va voir de profonds changements dans son organisation. Au début de la domination française, l'Eglise n'est pas reconnue mais simplement tolérée. Ses biens sons vendus et ses revenus supprimés. En 1799, les cultes sont de nouveau officiellement autorisés, et l'Eglise peut alors se réorganiser sur de nouvelles bases. En 1803, les paroisses de l'ancien évêché sont divisées en quatre « Eglises consistoriales » (Bévilard, Corgémont, Saint-Imier et Bienne) dirigées par le grand consistoire et les consistoires locaux. Après le Congrès de Vienne et la réunification de l'ancien évêché de Bâle au canton de Berne, l'Eglise jurassienne est incorporée à l'Eglise bernoise et la Classe du Jura est créée.
Auteur·trice du texte original: Emma Chatelain, 02/03/2006
Fonds d’archives
Mémoires d'Ici, Fonds de l'Eglise réformée jurassienne
Bibliographie
Charles-A. Simon, Le Jura protestant de la Réforme à nos jours, 1951, pp. 46-48, 87-91, 151-159, 178-182, 209-260, 271-279.
Pierre-Olivier Léchot, "La vénérable Classe d'Erguël. De la Réforme aux Lumières", in ASJE, 2002, pp. 214-246.
Suggestion de citation
Emma Chatelain, «Erguël, Classe d'», Dictionnaire du Jura (DIJU), https://dictionnaire-du-jura.ch/f/notices/detail/4029-erguel-classe-d, consulté le 19/03/2025.